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Le Cadeau - Episode 1/ Rencontres

Dernière mise à jour : 31 déc. 2021


Un joyau illumine gracieusement la scène qui m’accapare et embrase mes sens. Ma perception du monde est happée par l’éclat envoûtant qui attire, retient puis emprisonne toute attention qui aurait le plus grand bonheur de l’effleurer. Une fois capté par l’attrait irrésistible de cet astre, le désir de l’observateur ou de l’observatrice s’élance dans une spirale sans fin où le temps, petit à petit, disparaît et l’intensité croît à mesure qu’il approche inexorablement de la source qu’il espère secrètement pouvoir conquérir. L’étourdissement menace les curieux imprudents. L’excitation emporte le monde qui l’entoure à commencer par le barman qui peine à servir les autres clients eux-même hypnotisés.


Le joyau s’anime, prend vie. Certains diamants, parfois, par leur perfection, dans leur ancestrale immuabilité, semblent néanmoins vivants lorsque le regard se perd dans leurs reflets et facettes. Si sa perfection n’a rien à envier à ces diamants ornant les plus belles parures, la vie la rend plus belle, plus intense. Intensité qui ne doit pas qu’à sa beauté. De certains êtres, naturellement, par d’infimes détails s’imposant à l’inconscient de leurs contemplateurs, émane une aura enveloppante chargée d’une sensualité électrique et suave à la fois. La douceur d’une gestuelle, un éclat dans le regard, un frémissement de lèvres, le positionnement d’un menton, la danse de mains, la grâce de la courbe d’un sein ou d’un fessier idéalement cambré ou d’autres signaux plus discrets encore participent de cette fascination érotique que ces anges inspirent.


Elle porte nonchalamment le cocktail vers ses lèvres rouges. Ses longs doigts fins aux ongles du même rouge que celui ornant sa bouche semblent à peine effleurer le verre à Margarita. On pourrait presque penser à une danse tant son mouvement léger accompagne la musique qui emplit le bar. Un sourire m’échappe lorsque j’aperçois subrepticement l’un des hommes présents au regard emprisonné par mon joyau recevoir une sèche réprimande de la femme qui l’accompagne et qui étrangement semblait vouloir bénéficier d’un peu d’attention. Comment lui en vouloir? Il n’y est pour rien. Elle le sait sans doute ce qui exacerbe sa jalousie, son envie de le punir. Il subira sa vengeance ce soir. Je me plais à penser que l’intensité de ces quelques minutes seront pour lui une récompense suffisante pour supporter la soirée désormais gâchée qui l’attend. Je rêve de me lever, de m’approcher de leur table, poser ma main sur l’épaule de cette victime tout en prenant possession du regard de sa femme (j’ai repéré l’alliance), l’envelopper d’un sourire suffisamment séducteur pour la troubler elle aussi à son tour, en profiter pour laisser mon regard furtivement dévoiler un fin mélange d’arrogance contrôlée, de douceur et de domination lui laissant entrevoir ce qu’une vie ou quelques heures à mes côtés pourraient lui offrir, lui coûter. Puis, après avoir déposé un “bonne soirée”, m’éloigner. J’hésite, je calcule, je tente d’évaluer les conséquences pour cet homme d’une telle séquence. Pile ou face. Je crains fort que loin d’apaiser son épouse presque charmante et si apprêtée, la tension sexuelle ainsi créée chez elle prenne la forme d’un ressentiment dirigé vers la proie la plus facile ce soir, ce mari incapable de lui offrir ce qu’elle même n’a jamais réellement osé espérer, peut-être au mieux juste fantasmer en lisant d’insipides romans aux 50 nuances de gris. Gris… C’est le mot. Ni blanc, ni noir, sans contraste, sans saveur. Le contraire de ma vie avec Elle. Je m’attendris presque. Quelle tristesse que ces vies enfermées dans leurs diktats pseudo-moraux se privant ainsi de la plénitude d’une sexualité libérée et assumée.


Fin du petit intermède. Ce couple insipide ne saurait mériter plus de mon intérêt, lequel se reporte instinctivement vers le centre de ma galaxie pour en admirer l’attraction fascinante qu’Elle exerce sur les papillons qui se sont imperceptiblement rapprochés, attirés par cette lumière aveuglante dans le gris de leur quotidien.


A mon tour je l’observe attentivement. Pourquoi en laisser le plaisir et le loisir exclusivement aux autres?


Elle n’est que beauté, sensualité et attraction bestiale. Intimidante. Peu d’hommes auraient le courage de l’aborder. La confiance en soi nécessaire à un tel exploit fait défaut à la plus grande part. Il est impossible de la confondre avec l’une des abeilles habituées de ces lieux. Un petit rien l’en distingue aussi clairement que le soleil se distingue de la lune. Peut-être est-ce dû au fait que sa sensualité, son charme implacable ne sont pas feints, joués mais au contraire s’élancent vers l’univers avec la volonté de le réchauffer. Le tout en maintenant un très léger air hautain achevant de déclencher chez les mâles alentour une pulsion violente de possession. Tant de frustration. Les pauvres. Sauf un.


La voie lactée de ses cheveux châtains coule le long de son dos pour caresser ses reins et laisser place à cette cambrure dessinée par la tension du satin de sa robe. Le regard ayant dérivé sur ce fleuve se laisse ensuite emporter vers ses longues jambes gainées de bas noirs. Détrompez-vous. Aucun délit d’initié dans cette révélation. Je l’ai certes vue se vêtir ce soir mais un observateur avisé devinera la couture du haut de ses bas rendue légèrement perceptible par la combinaison, que je sais calculée, de la fente de sa robe noire longue et du croisement de ses jambes. Si l’observateur parvient à se détacher du piège tendu par ce détail, il se laissera glisser sur la douceur du nylon jusqu’à ses escarpins aux talons de 12 cm, à la semelle aussi rouge que ses lèvres et ses ongles. Là, perdu dans son désir, il n’aura plus d’autre option que d’entamer le trajet retour dont la fin pourra s’avérer mortelle pour les fantasmes construits depuis leur adolescence. Leur coeur frappant toujours plus fort, les pupilles dilatées, ils remonteront, comme s’ils caressaient les cuisses sublimes qu’ils rêvent écartées pour eux, puis arrivés au carrefour de la cambrure prendront cette fois le chemin passant par un ventre plat, pour parvenir, épuisés de tant d’efforts, à la courbure de deux seins en poire qu’ils savent d’une taille suffisamment parfaite pour déborder à peine du creux de leurs mains puis à la pointe de deux tétons tendant le tissu si léger de cette robe qu’ils veulent désormais déchirer. Chaque respiration, lente, apaisée, sereine, tend un peu plus la robe et la poitrine convoitée semblent prête à glisser hors d’un décolleté se terminant à la base des seins. Peu seront capables de quitter le creux de ce décolleté.


Autant d’imbéciles, de faibles. Autant d’observateurs qui perdront le sel de ce qu’Elle leur offre. Car au-delà, au-dessus, pour la minorité dont la volonté est assez trempée pour poursuivre l’éreintant parcours, se trouveront un cou à la peau fragile à peine hâlée, puis un menton délimitant le début d’un visage d’une finesse inégalée, porté à peine haut. Enfin, les heureux élus découvriront l’astre ayant monopolisé leurs sens depuis plusieurs minutes en plongeant dans un regard bleu, puissant, émanation d’un pouvoir mystérieux pour beaucoup, libération de la Femme dans toute sa beauté, dans toutes ses facettes, dans l’expression de sa sensualité, de sa confiance. Sans doute suis-je le seul ici capable d’y lire en plus l’amusement dissimulé. J’aime tant lorsqu’Elle s’exprime ainsi.


En un sens, sa présence ici est une insulte au lieu. Perché au 39ème étage de la tour The Shard de Londres, dévoilant par-delà ses grandes baies vitrées une Londres moderne et vivante en cette nuit sans étoiles, l’écrin pourtant somptueux qui accueille ce joyau irréel lutte contre l’éclipse qu’il subit. Le spectacle de la Tamise caressant la City jusqu’à Buckingham Palace, frôlant Covent Garden, celui des trains illuminés serpentant entre les buildings modernes ayant peu à peu remplacé les immeubles plus traditionnels pourtant toujours vaillamment accrochés au 21ème siècle, le tout à perte de vue, englobant cette ville en constante évolution, adaptation, est conçu pour absorber les clients qui peinent normalement à apprécier une cuisine chinoise pourtant des plus raffinée. Seulement voilà, Elle a volé la vedette à Londres. La cité a lutté sauvagement à son arrivée, jalouse de se voir contester son ascendant sur la fascination ambiante, mais a dû se resigner. Aussi vivante soit elle, elle ne peut rivaliser avec un astre qui l’illumine de sa seule présence. Reste que la vision de cette déesse dont la silhouette se découpe sur la ville pas encore endormie, entourée d’arbres dont les branches tombantes portent de petits cartons aux inscriptions chinoises, d’un décor tout droit sorti du Palais impérial de Pékin, à la lumière savamment tamisée, éclipse la beauté de ce lieu parfait.


La voilà seule depuis dix bonnes minutes, assise au bar. Seule à pouvoir profiter pleinement de la vue incroyable qui s’offre à elle, vaincue. Aucun homme n’a osé l’aborder. Un groupe de trois jeunes hommes du même âge qu’elle à peu près, la jeune trentaine, sans doute des rejetons de la finance, la contemplent. Ils préfèreraient la mater mais n’y parviennent pas son charme rompant toute vulgarité. Je devine d’ici leurs plaisanteries que je n’entends pas, leurs bravades. Tous jouiront ce soir grâce à elle, je le sais, ils le savent, Elle le sait évidemment. Aucun d’eux toutefois n’aura eu la chance, le courage plutôt de s’approcher d’elle. Un simple humain n’a aucun droit de s’adresser à une divinité. Ce phénomène ancestral se répercute à travers les âges pour paralyser ces hommes trop conscients qu’en s’approchant trop près de la lumière qui les attire, comme les papillons, ils se consumeront. Il me semble avoir ressenti cela à l’adolescence avant que quelque chose en moi se casse, ou à l’inverse se crée je ne saurais dire, me privant de cette prudence intimant aux hommes de ne pas aborder une femme intimidemment plus belle et brillante, intouchable. Je m’amuse à sonder la salle. Repère tous ces hommes perdus dans la contemplation, certains accompagnés aussi discrètement que possible, d’autres souvent moins discrètement. Quelques femmes ont été happées elles aussi. Deux sont très belles, sophistiquées. Elles semblent venir de l’Est de l’Europe. Je distingue dans le regard de l’une d’elle une pointe de jalousie.


Elle est sans doute habituée, à moindres échelle, à être l’étincelle qui attire quelques regards. Ces regards lui sont volés ce soir. Dans le regard de l’autre, je lis ce que je lis dans le regard des hommes présents. La fascination y est néanmoins accompagnée d’une pointe d’hésitation. Elle semble lutter pour ne pas s’approcher, entamer une conversation. Elle est consciente qu’elles ne sont pas égales mais assez sûre d’elle pour tenter sa chance. L’assurance que je décèle en elle lui permet d’écarter toute jalousie d’avoir été éclipsée. Elle est au-delà de cela. Elle sait pertinemment que si elle le voulait, chacun des hommes ici, à part moi sans doute, la supplierait pour la baiser ou être baisé par elle selon. Elle veut juste goûter à cette perfection. Un frisson me parcourt la colonne vertébrale et une érection me surprend en imaginant l’effet qu’un baiser échangé entre mon joyau et cette magnifique femme aurait sur la salle. Les deux chevelures blonde et châtain se mêlant, les seins parfaits rencontrant leurs alter égo au travers des tissus légers de ces deux robes mettant en valeur chaque centimètre des corps parfaits qui les portent. Ces deux bouches rouges se trouvant, fusionnant. Quel dommage. Pas ce soir. Tant mieux pour le coeur des hommes présents.


Un regard rapide à ma montre m’indique qu’il ne devrait pas tarder. Sa fébrilité doit être à son comble. J’essaie de me mettre à sa place quelques instants. Ressentir ce qu’il ressent à une poignée de minutes d’une expérience qu’il ne pensait pas un jour pouvoir vivre. Une excitation saisissant le bas du ventre, une pression intense sur la poitrine. Une expectative insupportable. Un doute immense. Une envie si brutale qu’elle l’enflamme. Le coeur au bord de l'explosion, le rouge montant dans le cou et les joues. La réalisation d’un fantasme dans de telles conditions entraîne forcément toujours une appréhension incontrôlable. Quel homme heureux. Bien entendu la sélection a été impitoyable. Il nous était inconcevable de rencontrer un homme incapable de relever le défi lancé par les yeux bleus de ma douce. Il est certes beau, bien fait mais ils étaient des dizaines. Il est le seul ayant su attirer l’attention de mon joyau, puis son intérêt et un début de désir. Seules les prochaines minutes voire secondes lorsqu’il entrera dans la salle, la repérera et se dirigera vers elle, pourront faire naître en elle le désir ou au contraire l’éteindront inexorablement. Il le sait. Doit être tendu à l’extrême à cette idée. Il était néanmoins le seul semblant capable de la séduire. Nous verrons.


Le voilà, pile à l’heure. Je l’observe en haut de l’escalier en verre qui mène au patio où les clients sont accueillis. Conforme à ses photos. Mieux même. Bel homme de 35 ans, châtain clair, je ne distingue pas la couleur de ses yeux que je sais bleus, il porte un costume noir parfaitement taillé sur une chemise blanche immaculée. Sa façon de répondre à l’hôte d’accueil et de lui tendre son manteau laisse entrevoir ce qui l’a distingué des autres, une confiance en soi inébranlable, ou presque. Il se comporte comme si les lieux lui appartenaient, imposant par son charisme sa présence aux autres, mais souriant, agréable. Je sais combien en réalité il est chamboulé. Il s’avance sur la passerelle, ne peut évidemment s’empêcher d’embrasser Londres du regard, et commence à scanner la salle.


Océane l’a repéré, évidemment, elle feint l’indifférence. Quelle joueuse! Je la connais, son excitation vient de débuter. D’un regard elle l’a jaugé, et visiblement considéré, au moins à distance, digne de tenter de la séduire. Elle commence sans doute déjà à mouiller. C’est ce moment que choisit le barman, sublime homme noir aux muscles dessinés, cheveux en dreadlocks attachés, qui a sans doute déjà dégusté la plupart des femmes sur lesquelles sont dévolu s’est porté, pour débuter la conversation. Je la vois sourire et s’ouvrir. Elle joue avec lui. Ce n’est pas méchant mais il mérite bien une récompense pour son audace. Elle le fait sans doute peut-être aussi pour punir l’impudent nouveau venu de son apparente décontraction et faire grimper la pression. Elle maîtrise cet art si parfaitement. Elle semble lire non pas dans les pensées mais dans les sensations les plus profondes, être capable de plonger dans les inconscients pour ensuite agir, réagir pour déclencher le sentiment, la sensation qu’elle souhaite. Elle est si pure et parfaite qu’elle n’use de son pouvoir que pour jouer innocemment avec le désir, jamais pour blesser.


Les deux russes (généralisons) l’ont repéré également. La jalouse se redresse, se cambre, l’ignore ostensiblement dans le but pathétique d’attirer son attention. Veine tentative tant elle sait d’ores et déjà qu’il ne lui est pas destiné ce soir. Ayant eu pitié d’elle toute à l’heure à mon arrivée et quelques fois depuis je me suis contenté d’un sourire charmeur mais indiquant clairement que ce soir je ne m’intéresserais pas à elle. Son amie, sans doute bien plus intelligente, semble avoir compris ou pressenti le lien qui m’unit au joyau l’éclipsant et m’avait rendu un sourire plein de compréhension et peut-être un peu d’espoir d’être incluse dans ce lien pour ce soir.


Il les repère, évidemment, mais ne s’attarde pas sur elles. Le centre de la gravité de la salle, le point d’attraction capte évidemment son regard, lequel, à l’instar de tous les autres, s’élance dans la spirale étourdissante de la contemplation. Il s’avait à quoi s’attendre, ayant eu le privilège de contempler quelques photos bien choisies de mon joyau mais est désarçonné par la réalité, la vie qui en émane. La sensualité le frappe de toutes ses forces. Son sourire conquérant s'efface une seconde. Je ne décèle aucune peur mais un doute soudain. Normal, je ne puis lui en vouloir. Ce léger doute aura sans doute accentué l’excitation d’Océane qui feint toujours de ne pas l’avoir vu. Il se ressaisit vite, débute sa descente des escaliers. Il profite de ces quelques secondes pour reprendre ses esprits, rassembler ses forces pour tenter l’impossible et ne pas se noyer dans le tourbillon qui a emporté les autres clients. Nul doute qu’il sera détesté par nombre d’entre eux ce soir.


Le barman a été délicatement éconduit. John, c’est son nom, s’est approché, timidement. Il tire le fauteuil haut à droite d’Océane, et s’y assoit. Se faisant, il ne peut avoir ignoré les bas qui se dévoilent un peu plus que toute à l’heure, la peau de sa cuisse étant désormais visible. Lois de la gravité ou geste délibéré d’Océane ? Je n’aurai pas la réponse ce soir.


Une très jolie serveuse m’apporte une coupe de champagne commandée quelques instants plus tôt. Je me laisse glisser plus profondément dans le fauteuil confortable dans lequel je me trouve depuis notre arrivée, à 5 mètres environs de la scène que je contemple, la remercie sincèrement en même temps qu’une pensée lubrique me passe par l’esprit tant je la vois bien mêlée à nos jeux. Je me reconcentre sur le spectacle qui s’offre à moi. Enfin.


***


Il est beau. Très beau. Peut-être un peu trop minet, un peu trop apprêté mais contrairement à beaucoup de ses contemporains il ne s’oublie pas dans la création d’une image instagramable parfaite. Je l’ai tout de suite repéré. Les regards des mâles m’ennuyaient. Aucun ne contenait le degré d’intensité minimale qui aurait pu au moins me permettre de jouer avec. Rien de bien méchant. Croiser leurs regards, changer de position en accentuant ma cambrure et laissant mes cheveux caresser le haut de mon cul, tout cela m’aurait amusé pendant ces longues minutes à l’attendre et alors qu’Eric m’observait, nous observait tous depuis son fauteuil.


Je le vois se délecter de l’effet que je déclenche. J’aime le savoir dans cet état. C’est peut-être ce qui me pousse à aller un peu plus loin, dévoiler un peu plus mes cuisses, capter un peu plus de regards avant de les ignorer une fois capturés. J’ai bien remarqué les deux jeunes femmes qui chacune ont tenté de jeter leur dévolu sur mon homme. Je me suis amusée de la naïveté de l’une d’elle qui m’avait si mal dévisagée lorsque je descendais les escaliers. Comment peut-elle croire une seconde que l’intérêt d’Eric pour elle ne puisse dépasser la simple envie de la prendre rapidement. Elle a tout pour plaire à ces mâles trop peu sûrs d’eux-mêmes pour m’aborder mais manque cruellement de la sensualité qui seule peut le toucher, l’enflammer. C’est malheureux. Peut-être Eric saurait-il la former, lui entre-ouvrir la porte d’une sensualité enfouie? Je crains que, malheureusement pour elle, cela n’arrive jamais, si tant est qu’elle ait au fond d’elle cette graine qu’il sait découvrir et cultiver.


Son amie est très différente. J’ai senti son regard me caresser, me déshabiller. Sa beauté délicate vient sans doute d’une froideur calculée mêlée d’une sensualité exacerbée que seuls les initiés peuvent déceler. Un autre soir j’aurais eu envie d’elle, de goûter sa peau, d’offrir la mienne à ses doigts, ses caresses et sa langue. J’aurais aimé la voir sucer Eric avec passion puis le voir la baiser sauvagement avant de partager son sperme avec elle. Un autre soir… J’espère qu’elle trouvera un homme capable de lui donner un dixième du plaisir qu’elle mérite ce soir. Elle doit m’en vouloir d’avoir pour moi seule les deux seuls hommes qui sans doute seraient capables de lui apporter ce qu’elle recherche.


Lui: “Bonjour, Océane c’est bien ça?”


Bon un peu banal mais, le pauvre, avouons que la situation peut l’intimider.


Je choisis ma voix amicale, douce et sensuelle. Il ne mérite pas de froideur. Mon regard se plante dans le sien, profondément. J’y lis la convoitise, l’envie bestiale, le doute aussi, le jeu. J’aime. Je me redresse légèrement, lui laissant entrevoir plus pleinement mon décolleté et l’absence de soutien-gorge.


“C’est bien moi oui. Si vous connaissez mon prénom j’imagine que vous n’êtes pas l’un de ces hommes qui depuis toute à l’heure m’observent sans pour autant oser venir me parler bien que je m’ennuyais esseulée?”


Un sourire ravageur. Parfait. S’il s’était démonté tout aurait pris fin dans l’instant. Je n’en ai pas envie, je veux jouer et, surtout, ce soir, il mérite mieux.


“John. Enchanté. Je n’ai pas eu de mal à vous repérer. Il m’a suffi de suivre les regards et la tension sexuelle”.


Jolie répartie. Il me plait. Sa chemise cintrée laisse entrevoir des pectoraux solides sans être démesurés. Je commence à me laisser porter à m’imaginer les caresser. Quel dommage qu’il porte une veste de costume qui m’empêche de voir mieux ses bras que j’imagine parfaitement musclés. J’ai un faible pour les bras…


“Je suis ravie que vous m’ayez retrouvée. Je commençais à m’ennuyer.”


Il se tourne vers le barman qui mobilise tout son professionnalisme pour ne pas lui jeter un regard furibond. Disons que le regard est juste courtois. Il s’exprime dans un anglais parfait.

“Une bouteille de champagne s’il vous plaît”


J’aime qu’il ne m’ait pas demandé avant ce que je souhaitais. Il prend les devants. C’est prometteur. Il se détend, s’aperçoit que ce qui lui semblait impossible, me séduire, sera peut-être à sa portée. Que dois-je faire? Lui rendre la tâche plus difficile? Le laisser mariner? L’aider un peu? J’ai envie de lui c’est certain. Eric regarde et s’amuse je le vois du coin de l’oeil.


“Tiens donc! Champagne?! Avons-nous quelque chose à fêter?”


Faussement ingénue. Je connais bien évidemment la réponse. Il le sait. Le jeu de séduction débute réellement. C’est ainsi que le désir naît, se développe.


Il rougit imperceptiblement, son regard quitte le mien pour trouver ses mains posées sur le bar. Ma question et ce qu’elle implique nous renvoie à la raison de ce rendez-vous, de cette soirée et à son incongruité. Il est certes libertin mais la situation reste néanmoins particulière pour ma plus grande excitation.


Avant que je n’ai le temps d’être déçue, il relève la tête et plante ses yeux bleus foncés dans les miens. Relevant ainsi explicitement le défi. Il ne me dominera pas. Jamais. Il ne le sait pas et n’a pas besoin de le savoir. Il me suffit de prendre plaisir, ce soir, à le lui laisser espérer ce qui avec chance pourrait décupler son plaisir et le mien plus tard.


“Disons déjà la chance qui m’est donnée de vous rencontrer”


Parfait charmeur. Il pourrait presque rivaliser avec Eric. Il lui manque néanmoins un brin d’espièglerie que seule une confiance en soi frisant l’arrogance sans toutefois s’y dévoyer peut conférer. Son charme me suffira pour ce soir. J’espère qu’Eric profite car moi je m’amuse follement.


***


Elle est incorrigible. Impossible pour elle de jouer la soumise plus de deux secondes avec des hommes comme celui-ci. Elle va jouer avec lui toute la soirée tout en le laissant croire qu’il maîtrise la situation. Après tout, ce soir en particulier, il a le droit de penser ce qu’il veut. De vivre le fantasme aussi parfaitement que possible.


Je prends tant de plaisir à les observer alors que leurs flûtes de champagnes s’entrechoquent délicatement et qu’elle porte sensuellement la coupe à ses lèvres en parfaite allumeuse, que je n’ai pas repéré la présence qui vient de s’installer dans le fauteuil juste à côté du mien.


“Vous êtes français n’est-ce pas?”


Je n’ai pas besoin de me tourner pour deviner qui vient de prononcer cette question teintée d’un léger accent russe. Sans me détourner, je souris, porte lentement mon verre à mes lèvres, laisse le champagne couler dans ma gorge et les bulles papillonner sur ma langue. Une fois cette dégustation terminée, le regard toujours planté vers Océane et John, je réponds.


“Je ne sais si je dois être vexé ou flatté que vous ayez pu le deviner sans même me parler”


"Ni l’un ni l’autre. Disons juste que votre attitude et les jeux que je devine m’ont conduite à cette déduction. Et peut-être aussi votre accent”


Mon sourire s’élargit nettement. Je l’avais donc bien jaugée, et inversement visiblement.


“Vous semblez très observatrice. Je ne vous ferai pas l’affront de demander à quels jeux vous faîtes référence.”


Au passage de la serveuse je commande une seconde coupe de champagne. Se faisant je repère un regard en biais d’Océane qui n’a pas manqué de remarquer le petit changement de situation. Un centième de seconde je lis un éclair de jalousie dans son regard furtif mais le sourire qu’elle me lance aussitôt l’efface instantanément. Bien évidemment elle laissera maintenant son talent de séductrice et d’allumeuse s’exprimer d’autant plus intensément pour notre plus grand plaisir à tous même si la raison sous-jacente se rapproche plus d’une mini gifle m’étant destinée.


La robe de mon assaillante est très courte, rouge, dévoilant des jambes tout aussi longues que celles d’Océane, nues, terminée par des escarpins que je crois être des Jimmy Choo. Le haut de la robe est un bandeau laissant apparaître de jolies épaules dénudées et dont le tissu s’arrête juste à la naissance du décolleté que je ne peux qu’imaginer. Les cheveux sont longs, blonds, très lisses. Le visage est délicat, un brin austère à mon goût, rehaussés d’yeux bleus espiègles aux éclats joueurs et d’une bouche rouge qui semble petite mais pulpeuse, un peu plus de la trentaine. C’est une très belle femme dont la beauté plastique s’efface sans souci derrière la sensualité qu’elle sait exprimer contrairement à son amie laissée désoeuvrée plus loin à leur table.


“J’aimerai être à sa place” me glisse-t-elle


“Vraiment? je suis ravi que vous le trouviez à votre goût, cela me rassure, nous avons eu beaucoup de mal à le sélectionner”


Elle laisse éclater un rire sincère et enjôleur.


“A sa place à LUI voyons! Il est certes très beau et pourrait faire un amant correct à n’en pas douter mais votre amie m’envoûte depuis son arrivée. Elle a eu la délicatesse de me remarquer tout comme vous mais je crains que cela n’ait fait qu’aiguiser mon désir”.


“Me donner-vous une seconde raison de me vexer ce soir?”


“Toutes mes excuses! Il me semble, que vous n’avez nul besoin que j’exprime mon désir pour le ressentir. Je serai bien évidemment ravie de m’offrir à vous mais j’ai compris au premier regard que ce soir, jamais en réalité, je ne pourrai rivaliser avec votre amie”.


“Ne vous inquiétez pas, je plaisantais simplement. Je suis ravi de partager avec vous ce spectacle miraculeux et de votre confirmation de ce que je puis user de vos charmes à ma guise”.


La coupe de champagne s’est matérialisée dans sa main. Je la sens légèrement perturbée. Un autre jour, un autre jeu et nous aurions eu plaisir à la dévorer. Il est si agréable de rencontrer les rares personnes sachant s’accorder à la vibration qui nourrit notre désir à tous les deux et nos vies.


To be continued...


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